Arts visuels

Yvon Gallant – Le trait, la couleur, leurs mystères

today14 août 2022 13

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Il vit au Nord-Est du Canada, à 4 885 km de Paris à vol d’oiseau. Sa petite maison est située dans la ville de Moncton. « C’est un peu la campagne en ville. J’ai grandi avec des Anglais. Chez moi, en Acadie, on parle français avec des mots anglais. Un peu vite. C’est un reste de la colonisation. Pas vraiment suuûûr. »

Ileana Cornea

« Il y a des oiseaux, beaucoup d’oiseaux, des faisans, des écureuils. J’ai planté des bleuets, des framboises, de la sarriette. Les gens qui ne la connaissent pas s’imaginent des choses. » Il a grandi au bord de l’Atlantique, au milieu d’une nature vertigineuse et, comme toute sa génération, il était entouré d’images pieuses, dans un monde régi par les religieux. L’université de Moncton a été fondée en 1963 et il fait partie de ses premiers diplômés en arts visuels.

Dès son jeune âge, il lit beaucoup. À la Bibliothèque publique il découvre la vie de Van Gogh, qui aiguillonne son désir de peinture. Il connaîtra la notoriété : c’est « le » peintre des personnages sans visage. Son entourage remarque très vite son talent et l’incite à manier le crayon. « Pendant les cours de mathématiques, ma maîtresse disait : toi, continue à dessiner. » Son père était cheminot et sa mère, sensible aux préoccupations artistiques de son fils, l’encouragea. « Elle était superstitieuse. Elle comptait les mouches. Une mouche signifiait une tempête de neige, 10, que la tempête allait durer 10 jours. »

Humour, candeur, symbolisme

Ce contexte archaïque et dévot nourrit son imaginaire riche et complexe, ressurgit dans ses toiles aux couleurs douces, pleines d’humour, de candeur et de mystère. Son graphisme est leste et rapide, son trait présent et gras, se rapprochant de la bande dessinée sans en franchir la limite. Les corps, attitudes, mouvements des personnages, la perspective, ne sont jamais étouffés mais suggérés, insinués ; tout comme les histoires racontées et leur subtile, profonde, symbolique. Dans le monde silencieux de la peinture, les personnages d’Yvon Gallant n’ont pas besoin d’yeux pour compter une liasse de dollars (tableau La Bonne nouvelle des États) ni de narines pour sentir le thé brûlant (Time for tea à 3h) ou la sarriette ensorcelante (série La Sarriette). Mais pour façonner un bouquet de fleurs signifiant la fragilité des tiges et la beauté des coroles, pour esquisser l’herbe abondante où une vitrine, il laisse courir les traits, les affine comme s’ils prenaient de la vitesse. Il nous rappelle parfois R. Dufy (1877-1953), l’artiste normand dont Yvon Gallant aime l’œuvre, découverte lors d’expositions en France.

Laisser aller la mémoire

« Je me promène dans la rue. Les gens font des gestes, je trouve cela intéressant. » Comme dans la grande peinture du passé, la gestuelle mène ici la narration. Yvon Gallant raconte des histoires de mémoire, de cette « mémoire qui laisse aller » parce que le passé et le présent s’embrouillent dans la poésie (Le visiteur mystérieux). Le décor est en perspective sans perspective. Rien ne repose quelque part et cependant l’air passe, naturellement. Le trait noir dirige cette atmosphère étrange, nerveux de temps en temps, pour donner de la vie et de l’énergie à l’ensemble.

Sur un vieux fauteuil est étendue une peau de vache aux taches noires poilues. Un personnage à casquette est assis devant un livre fermé. « C’est une bible » précise le peintre. « Il y a un verre d’eau, une bouteille de vin et des médicaments. Ce sont des hostiles », rectifie–il. Et ces chevilles chaussées de souliers rouges ? « Une sorcière qui s’est électrocutée ! » On n’en saura pas plus mais l’œuvre est remarquable. Aspect important de cet œuvre : les portraits sans visage, dont la popularité a atteint la commande publique. L’artiste vient de terminer le 104e. Marqueurs de communautés : « Tout le monde veut son portrait. Artistes, politiciens, poètes, musiciens… » Alors, tel le rococo J-H. Fragonard (1732-1806), il le réalise en 20 minutes, « puis byebye », au suivant ! Il rit. « Avec cette guerre… Il faut un effort surhumain pour rire aujourd’hui. »

Quelques dates

1950 – Naissance à Moncton (Nouveau Brunswick).
1972-1976 : Université de Moncton.
1980 –  Installe son atelier au Centre culturel Aberdeen, à Moncton.
1981 : Premières expos personnelles, dans la province de Québec.
1986 : Boursier du Conseil des Arts du Canada.
1987-1989 : Vit à Montréal. – Les expos se multiplient, notamment en France (Paris et Poitiers), Équateur, à La Nouvelle Orléans et en Louisiane (États-Unis).
1992 : Prix Miller Brittain.
1994 : Rétrospective à Charlottetown (Canada)
2005 : Membre de l’Académie royale des arts du Canada (Great Canadian Masters).
2018 : Expo Portraits de 50 personnalités influentes en Acadie à Caraquet (Canada)

  • Galerie Art-Artiste à Dieppe (Nouveau Brunswick) en permanence
  • Musée Michel Ciry à Varengeville-sur-Mer (76) « 5 artistes acadiens d’aujourd’hui »Jusqu’au 4 septembre

COMBIEN

300 à 25 000 $

Écrit par: SPAASI

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